27 décembre 2014
Jarre sur France Musique à propos du GRM (décembre 2014)
Interview de Jean Michel Jarre en marge de la soirée GRM Tools au palais de Tokyo.
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16 décembre 2014
Jean Michel Jarre reçoit une distinction numérique à l'INA/GRM
Jean Michel Jarre a reçu ce soir une tablette contenant toutes ses apparitions médias (télé et radio) des mains de la directrice de l'INA/GRM. Cette cérémonie a eu lieu en marge d'une soirée au Palais de Tokyo dans le lieu-dit le "Yoyo" qui mettait à l'honneur les GRM Tools (du Groupe de Recherche Musicale).
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14 août 2013
Interview d'Hélène Dreyfus sur les débuts de Jean Michel Jarre (1990)
Interview à Claviers magazine en janvier 1990 de Hèlène Dreyfus, étudiante au GRM en septembre 1968, et qui a accompagné les premiers pas de Jean Michel Jarre quand il s'est mis à vivre de sa musique.
Quel était son travail au GRM?
Hélène Dreyfus : Le musée de l’Homme nous avait confié un stock de bandes de musiques ethniques. En les recopiant, on les a écoutées. Jean Michel s’est passionné pour la voix plus que pour les instruments. On avait chacun notre stock de bandes, mais lui s’appropriait toujours les bandes de voix. On ne parlait pas en termes de notes, mais d’amas de sons, d’objets sonores. Il disséquait ces voix et a découvert une matière sonore nouvelle, bien avant qu’on ne parle de métissage, d’échantillonnage. Zoolook est la continuation de ce travail.
Il a découvert les premiers synthétiseurs au GRM?
H.D. : Il y avait un studio avec le grand Moog, réservé aux compositeurs établis : François Bayle, Guy Reibel, Parmegiani. Au bout de deux mois, Jean Michel travaillait déjà dans ce studio. Ce qu'il a sorti du Moog au bout de cinq minutes, c'était de la musique, alors que les autres faisaient beaucoup plus "cric, crac, boum!". Pour lui, c'était instinctif. Je pense que Parmegiani et Bayle l'ont laissé faire parce qu'ils l'ont quand même reconnu comme un vrai musicien. Jean Michel a pris des années d’avance sur les autres au GRM. Nous on était dans de petits studios avec deux ou trois magnétophones à quatre pistes, et on se débrouillait avec nos bandes et nos ciseaux : "Je te coupe un son, etc." On devait faire des compositions qui n’excède pas cinq à six minutes. La première fois que Jean-Michel a présenté une œuvre, c’était superbe. Pierre Schaeffer a dit : "Mais vous composez comme votre père!". Il s’amusait à prendre les voix, à les mettre sur d’autres pistes, couper dans un son pour pouvoir l’intégrer dans un autre.
Jean Michel quitte ensuite le GRM…
H.D. : Il a eu alors son petit studio chez sa mère, où la table de mixage était faite dans une boîte à chaussures : il y avait trois Revox (photo ci-contre). C'était une époque de débrouillardise… Il retravaillait les voix comme des objets : elles offraient un matériel sonore différent de celui des signaux électriques, beaucoup plus riche et complexe. Dès le départ, il cherchait à moduler, à avoir des nuances, de l'expressivité. C'était très difficile avec les machines de l'époque, avec les ciseaux, ce n'était pas évident non plus. Il a aussi acheté le VCS-3. Grâce au GRM, il a eu accès à un matériel unique. Il a appris dans les meilleures conditions à utiliser cet appareillage. Il a toujours manifesté une grande reconnaissance envers Pierre Schaeffer, son seul maître, mais on ne s'est jamais enorgueilli, par la suite, au GRM ou à l'IRCAM, d'avoir accueilli Jarre parmi les gens qui ont travaillé dans ces institutions.
En 1971, Jean Michel réalise A.O.R.…
H.D. : Schmucki a demandé à Jean michel d'écrire la musique pour son ballet, lors de la réouverture de l'Opéra. L'électronique entrait dans le temple de la musique classique. C'est la première chose qu'il a faite dans son studio, avec sa boîte à chaussures et ses Revox. À l'Opéra, ce fut le scandale parmi les musiciens de la fosse, qui ont ouvert des bouteilles pendant les représentations et débranché les haut-parleurs. Ils riaient carrément de lui. Les danseurs, eux, étaient très contents : c'était une musique qui se dansait. Je me souviens de la générale : ce fut une vraie bataille d'Hernani!
Puis sont venus les premiers disques…
H.D. : Jean Michel a fait La Cage, un succès très mitigé… Cette musique-là, à l'époque n'intéressait pratiquement personne… Il a récidivé, en faisant un disque avec Samuel Hobo. À ce moment-là, j'ai commencé à travailler avec Francis Dreyfus. Je pensais que Jean Michel devait signer un contrat, avoir une mensualité importante pour acheter du matériel et passer à un autre stade. Francis Dreyfus a compris cela. Il avait une exclusivité sur les œuvres de Jean Michel, mais ne l'a jamais pressé à sortir quoi que ce soit.
Jean Michel a composé une disque superbe de musique d'environnement, Deserted Palace. Puis Francis a engagé la production d'un trente-trois tours avec Christophe. Il n'y avait pas de parolier, j'ai donc proposé Jean Michel. Cela a donné "Les Paradis perdus"… C'est ainsi que tout a commencé…
Propos recueillis par Christian Jacob
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07 août 2013
3 questions sur… L'éducation musicale (1990)
1) De ta formation classique, quels sont les éléments qui te semblent aujourd'hui fondamentaux?
J-M J : L'étude classique de la musique par rapport à la musique d'aujourd'hui, je pourrais l'assimiler au latin par rapport à la culture générale. C'est un mécanisme intéressant pour comprendre le code musical européen dans lequel nous sommes immergés. Ce n'est pas forcément un passage obligatoire mais cela donne un autre éclairage à la manière de penser les structures ou le phénomène de composition. Je pense que ma vision de la musique serait différente si je n'avais pas étudié le contrepoint et l'harmonie par exemple.
2) Que penses-tu de l'enseignement de la musique tel qu'il est pratiqué actuellement?
J-M J : C'est une question qui me concerne énormément, liée à notre réalité biologique, c'est-à-dire au temps que l'on passe sur cette planète. Par manque de temps, l'homme a souvent une attitude de court terme, fait des impasses et cherche des raccourcis. L'éducation musicale est restée en plan, elle n'a guère évoluée depuis Jules Ferry. La musique d'aujourd'hui se fait à travers des instruments qui ne sont pas enseignés dans les écoles officielles, ce qui est paradoxal. Le saxophone fut inventé en 1840 et admis au conservatoire seulement en 1942… Pour l'instant, c'est le vendeur qui enseigne le fonctionnement du synthé. L'enseignement musical croupit et les disciplines artistiques sont pourtant une des clés pour aborder le XXIème siècle à égalité avec les pays culturellement puissants que sont les Etats-Unis et le Japon.
3) Quelle serait pour toi la pédagogie musicale idéale?
J-M J : Elle devrait être adaptée aux réalités de la société dans laquelle on se trouve. Si une société possède des instruments électroniques, cela dénote une manière différente de ressentir les choses, fondée sur les sons et non pas sur un code (le solfège par exemple). Une bonne approche serait donc un travail sur les sons. La musique devrait s'apprendre comme la cuisine, concrètement. Qu'est-ce qu'il faut mettre comme ingrédients pour obtenir un plat savoureux? Il faut pouvoir expérimenter, tripoter, mélanger, réaliser quelque chose, et pour la recherche, aller voir plutôt du côté de Jules Verne que du côté de l'IRCAM.
L'IRCAM est bien un centre de recherche mais si fermé qu'il ne profite qu'à quelques-uns, bien qu'il soit financé grâce aux deniers de l'Etat c'est-à-dire grâce à chacun d'entre nous. Ce manque d'ouverture ne fait avancer ni la musique ni la technologie. Le GRM était, lui, toujours en état d'urgence, sans statut officiel, donc remis en cause de façon permanente. Il avait le côté corsaire de la musique, vivant une sorte d'illégalité au sein de l'ORTF, ce qui était un bon catalyseur pour la création. C'était une manière de se battre et de rester éveillés, une confluence de personnalités, un organisme multicéphale, et c'est ce qui importe pour que toute recherche aboutisse à des trouvailles.
Propos recueillis par Catherine Chantoiseau
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03 août 2013
3 questions sur… Jarre au GRM (1969)
1) Quel a été ton premier contact avec la musique électronique?
J-M J : Mon premier contact avec la musique "sérieuse" a été de rentrer au GRM de Pierre Schaeffer, le studio de recherche de la radio, future ORTF, et c'est vraiment à lui que l'on doit tout. Moi, je pense que c'est le père de la musique d'aujourd'hui. Le premier à avoir établi que la musique pouvait être conçue en termes de son et pas seulement avec des notes, du solfège ou du code d'une part, et d'autre part, que ce qui pouvait différencier un bruit d'un son musical, c'est finalement l'intention qu'on y porte. Le fait d'enregistrer un bruit de voiture dans la rue, ça ne devient plus un bruit, mais un son musical à partir du moment où il est fixé sur une bande magnétique et qu'il devient quelque chose. Je crois que ça a changé ma vie de musicien ou d'artiste et changé le cours de la musique au vingtième siècle. Aujourd'hui, la musique la plus populaire du monde, la musique électronique, est issue de cette idée toute simple. Un bouquin devrait être donné à lire dans toutes les écoles du monde, dans sa version simplifiée, c'est son "Solfège des objets Musicaux".
Mon premier contact avec l'électronique ça a été de travailler sur des bancs d'oscillateurs. A l'époque, on travaillait vraiment avec des instruments de laboratoire scientifique ou médicaux qui n'avaient rien à voir avec la musique. "
2) Quelle était l'atmosphére au GRM, on a du mal à l'imaginer?
J-M J : "Ce n'étaient pas vraiment des classes, c'était plutôt (rires), comme une secte. Un tas d'allumés de différents horizons et de différentes cultures se retrouvaient là, des gens d'Amérique du Sud, des Anglais, des Allemands, des Chinois. Et puis, pas seulement des gens avec une formation musicale, mais des architectes, des philosophes, des historiens, des anonymes, des peintres, des graphistes, et c'est ce mélange qui faisait que ça ressemblait plus à une cuisine qu'à une classe. Des cuisiniers du son ! Moi, ma cuisine était de squatter celle des autres. Celle du GRM en particulier où j'essayais de piquer les clés des artistes qui étaient établis, les Bernard Parmegiani, François Bayle qui ont suivi les traces de Schaeffer et une voie purement "musique contemporaine". Ceux qui avaient accès aux instruments sérieux. On essayait de squatter les appareils, entre les expérimentations avec un micro et les bandes et l'enregistrement des séries de séquences pour les monter au ciseau et au scotch."
3) Par la suite, lorsque tu es devenu populaire, est-ce que tu n'as pas été considéré comme un mauvais élève, et par Schaeffer, et par ton père Maurice Jarre?
J-M J : " Non parce que Schaeffer m'avait toujours dit, "le GRM, c'est bien à condition d'en sortir". Au bout de deux ans et demi, il m'a dit : "Tu as pris tout ce que tu pouvais prendre ici. Ce n'est ni la recherche ni le laboratoire qui te conviennent. Il faut que tu ailles à la rencontre du public et faire de la musique pour les films, etc. en intégrant la mélodie". Fin des années 60, j'ai commencé à sortir des disques à tirage limité et monter un petit studio qui comprenait deux Revox et un premier synthé, le VCS 3, une version misérabiliste du Moog fabriquée en Angleterre. Quand je dis misérabiliste, ce n'est pas péjoratif parce que cela reste un de mes synthés préférés : un synthé sans clavier, vrai synthé de recherche que beaucoup de gens de la musique électronique connaissent. Il faut comprendre qu'alors, il n'y avait pas de processus industriel et que les mecs qui les fabriquaient étaient tous des allumés. C'étaient des artisans, des gens qu'on allait voir chez eux. On a acheté le premier synthé à plusieurs et on se le repassait, en partageant le temps de studio."
Propos recueillis par Jean-Yves Leloup
00:00 Publié dans 3 questions sur…, L'avant-Oxygène |
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