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03 février 2014

La Concorde, 1979 (Claviers magazine spécial Jarre, 1/1/1990)

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14 JUILLET 1979: PARIS Francis Dreyfus et Jean-Michel Jarre, à quatre pattes sur la scène, n’en croient pas leurs yeux. La place de la Concorde est noire de monde et la foule remonte lentement les Champs-Elysées, comme un encrier qui se répandrait vers l’Arc de triomphe. La scène est au pied de l’Obélisque et fait face à l’hôtel Crillon et au ministère de la Marine. Le podium (construit par les Pompes funèbres de Paris !) est recouvert de synthétiseurs, d’orgues électroniques, de claviers superposés, de tables de mixage et d’effets. Toute la technologie des années soixante-dix, des modulaires polyphoniques Korg et Oberheim à l’ARP 2600, en passant par les EMS, compagnons de toujours, les RMI computers et autres générateurs de rythmes, les Eminent et les phasing Small Stones aux piles artificiellement usées.

Jacques Rouveyrollis fait les ultimes réglages lumières. Azancot, en nage, charge ses dernières fusées et court avec les fils de déclenchement à la main. Les techniciens de Hold Up calent leurs images sur les projecteurs PANI et la sono qui longe le mur des Tuileries se gratte la gorge avant de donner toute sa puissance. Il est à peu près 22 h, le spectacle commence: l’intégrale d’« Equinoxe » et une bouffée d’«Oxygène» pour rafraîchir l’atmosphère. Un million de Parisiens vi vent le songe d’une nuit d’été. II n’y a pas encore de skytrackers, pas encore de lasers, mais le ballet des lumières de scène et les projections géantes déclenchent l’enthousiasme du public, baigne par les vagues de la marée synthétique. Les façades clignent de l’oeil, les grandes scènes de la Révolution s’affichent sur les murs (déjà !), avec des gags inattendus ( « Marat est assassiné dans sa baignoire par. . . Charlotte Rampling »). Les fontaines transpirent sous la lumiere, les lampadaires rougissent, les fleurs d’artifice s’ouvrent dans le ciel de Paris. Un million de spectateurs… Record absolu à l’epoque pour un concert en plein air… Dès la Concorde se trouvent réunis les ingrédients de la potion magique : le grand air et les grands espaces, le cadre monumental, la foule et l’atmosphère de fête populaire, avec la cohue bon enfant, l’attente, les merguez-frites et les télescopes en carton, le coude à coude et les cent pas. Très importante, dans la magie « jarrienne », cette communion collective de la foule qui vibre à l’unisson, des centaines de milliers de regards, de corps et d’oreilles qui partagent le meme émerveillement… On voit la musique et on entend la lumière, on déguste les images et on sirote le son, des rêves vous chatouillent les tripes, tandis que les échos et les reverbs spatialisent les couleurs.

21 janvier 2014

Respectant la tradition Paris s’est couché tard samedi (France Soir, 15/07/1979)

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Combien étaient-ils ? 100 000 ? 150 000 ? 200 000 peut-être à avoir pris la place de la Concorde pour une gigantesque lanterne magique à l’occasion du clou de ce 14 juillet 1979 : le spectacle son et lumière bleu blanc rouge du compositeur Jean-Michel Jarre.
Dès 21 heures, on ne respirait plus, on s’entassait, on s’écrasait. Beaucoup d’évanouissements : plus d’une centaine, un à la minute. Les 120 secouristes des équipes médicales de la protection civile, du SAMU et de la Croix Rouge n’ont pas chômé. Noria incessante de 16 ambulances autour des barrières protégées par un imposant mais débonnaire service d’ordre.

:: Physique de play-boy ::
Seuls les 800 invités officiels de la ville de Paris, assis face à la rue Royale, échappaient à la bousculade. Derrière eux, montés sur un énorme camion bleu, les projecteurs mobiles qui devaient renvoyer des diapos fixes, sur le vaste écran constitué par les façades du ministère de la Marine, de l’Hôtel Crillon et de l’église de la Madeleine au centre. Mais le coeur du spectacle c’était l’échafaudage où le nec le plus ultra de l’électronique musicale avait à son service 350 techniciens.

A 22 h 30 précises, le dieu Jarre surgit de son minicar vert émeraude en chemise satin gris, 26 ans, la mèche rebelle, physique de play-boy romantique, l’archange rentre dans la bagarre.
La musique planante d'Oxygène et d’Equinoxe, les deux succès du jeune compositeur, envahissent l’ancienne place de la Révolution qui, le 21 janvier 1793, vit un certain Louis XVI perdre la tête.

Des yeux, des colombes, des mains dont les extrémités deviennent des arbres ou des sans-culottes; des images fantastiques de la plus grande Révolution du monde animent les plus belles façades de Paris. C’est Paris-Hallucination, Paris-Magie, Paris-Poésie. Qui aurait pu penser que l’histoire de France puisse se conjuguer au disco ? Dans un halo de fumée artificielle, Jean-Michel Jarre salue la foule. Il est 23 h 10.

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20 janvier 2014

Musique de l’an 2000 pour une féerie tricolore (Le Figaro, 14/07/1979)

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Depuis 190 ans elle attendait ça. Ce soir, à 22 heures, la place de la Concorde verra sa plus grande heure de gloire depuis la Révolution. Un 14 juillet à sa dimension. Le peuple à ses pieds. Les Tuileries embrasées, mais d’un feu d’artifice. Les canons braqués sur ses édifices, mais qui ne cracheront que des images. Et au milieu de tout cela, un très jeune homme au visage de Saint-Just, mais musicien comme Rouget de Lisle. Jean-Michel Jarre, l’auteur-compositeur-metteur en scène de « bleu, Blanc, Rouge », spectacle audiovisuel commandé par la mairie de Paris pour fêter dignement une date mémorable entre toutes.

Au pied de l’Obélisque des kilomètres de câbles se tordent comme des serpents sur un trottoir jonché de lunes multicolores. Voilà pour l’oreille et, voilà pour l’oeil. Les câbles serviront à renvoyer des quatre coins de la place la musique de Jarre en quadriphonie. Les lunes insolites sont des caches de gélatine destinées à transformer les projecteurs en drapeaux patriotiques.
Sur la scène tendue de noir, Jean-Michel Jarre dispose « l’orchestre » qui jouera sa musique des extraits de ses deux oeuvres maîtresses Oxygène et Equinoxe.

- Où sont vos instruments, vos musiciens ? demande un photographe qui croit avoir affaire à une espèce de Karajan.
Jean-Michel Jarre désigne une trentaine d’appareils très jolis tableaux de bord d’acier poli constellés de boutons du plus bel effet des synthétiseurs.
Quoi pas de violons, pas de clairons, ni de piano ?
Jean-Michel Jarre s’apprête à fêter le 14 juillet sans tambour ni trompette.

- Depuis trois cent ans, explique-t-il, on s’obstine à jouer de la musique avec des instruments à cordes ou à vent conçus selon les besoins spécifiques d’une époque révolue. Aujourd’hui, tout a évolué. Les cassettes, la radio, la télévision ont remplacé l’orchestre. C’est l’ère de l’électro-acoustique. Chacun de mes synthétiseurs a remplacé un instrument. Le piano ; le violon de l’an 2000, c’est eux. »

Mais qu’on ne s’y trompe pas. Jarre est un authentique compositeur. Le synthétiseur, c’est comme le violon ou la harpe. S’il n’y a pas l’inspiration derrière, ils ne servent à rien.
Autour de lui, la Concorde prend, au fur et à mesure que s’affairent les électriciens de la ville de Paris, une drôle d’allure. Les réverbères sont bleus, blancs ou rouges. Les spots dans les vasques des fontaines sont coiffés de papiers transparents de couleur comme des pots de confiture.
Quatre boules énormes à facettes rappelleront aux nostalgiques du temps du tango que Paris ce soir sera un vaste dancing.

Ce spectacle, c’est l’adjoint au maire chargé de l’animation et du tourisme Jean de Préaumont qu’on le doit.
Avec l’habitude désormais acquise que dès que quelqu’un en France a du talent on l’envoie faire ses preuves dans les pays étrangers qui l’apprécient mieux que nous, Jean-Michel Jarre en avait proposé l’idée aux Anglais. En apprenant la chose Jean de Préaumont a décidé de faire mentir le proverbe qui veut que nul ne soit prophète en son pays et demande à l’auteur de l’adapter aux circonstances.

Paris donc se souviendra ce soir de son histoire sur une musique de l’avenir que dirigera au pied d’un obélisque vieux de trente siècles, un jeune homme de trente ans. Par le truchement de l’ Eurovision et des relais par satellite, 350 millions de spectateurs pourront être témoins de l’événement.
Il est vrai qu’en 1789 une vieille Bastille qualifiée de « réservoir à grenouilles » et qui s’était laissé prendre sans trop résister n’a pas eu besoin de tant de tapage pour devenir au fil des siècles, le symbole mondial de la liberté.

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11 janvier 2014

La Concorde tricolore (Paris-Match, 15/07/1979)

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:: Article de Paris Match sur le Concert de la Concorde :: Paris bleu – blanc – rouge, la grande de la place de la Concorde pour le 14 Juillet était à annoncée 22 heures. Arriver à une heure et demie à l’avance était raisonnable. L’air était doux, et on pouvait espérer un endroit où on pouvait s’inslaller comodément. Mais non. Des rues convergent et des Champs-Elysées – jalonés par des vendeurs de saucisses et par les cars des forces de l’ordre se déversait une foule flâneuse qui trébuchait sur les innombrables super-prudents. Beaucoup étaient déjà assis à même les pavés. Certains étaient carrément allongés, faisant semblant de bronzer comme sur une plage surchargée. D’autres encore étaient debout, un peu hésitants, surtout les femmes à hauts talons, prêtes pour les bals de nuit. Au milieu, un malin vendait des canettes de bière dans un baquet d’eau fraîche. Près des barrières, des jeunes gens offraient contre 2 francs un quartier de pastèque.

:: Les nostalgiques de Woodstock ::
Parvenus en face de l'échafaudage encadré de deux panneaux ('Mairie de Paris" en rouge et "Europe 1" en bleu) tout espoir de confort minimum était perdu, d'autant plus que le public s’épaisslssait par flots. Un public détendu et hétérogène. Un peu comme à la Fête de l’Humanité : des familles traditionnelles, des couples jeunes et vieux des bandes de jeunes cadres bien coiffés, des nostalgiques de Woodstock. Avec, en plus nombre incroyable de cosmopolites et quelques habitués nocturnes des bosquets des Tuileries, venus prendre un bain d’innocence.

Restait donc à repartlr à contre-courant, attelndre la rue du Faubourg-Saint-Honoré pour tenter sa chance de I’autre côté de la place. La rue Royale était barrée. Les gendarmes, souriants, mals Incorruptibles, réslstaient aux sourires et aux sollicitations du genre : "Je veux seulement prendre un verre chez Maxim’s", Quant aux autres rues, elles étalent totalement engorgées, et la foule se déversail toujours. Restait donc à courir jusqu’à sa télévision pour la retransmlssion sur TF1 et en Eurovision. Après un faux départ, un long blanc meublé n’importe comment par le présentateur Claude Dufresne, on a entendu la musique de Jean-Michel Jarre qui a conçu l’ensemble du spectacle. Et surtout on l’a vu lui. On l’a vu manipuler ses consoles et ses synthétiseurs, ôter et remettre son casque, s’angoisser, fermer les yeux, prendre un air inspiré. On pouvait croire que Paris le fêtait. On a vu quand même la partie audiovisuelle, les images scandées au rythme de la musique, projetées sur les pierres des hôtels, des paysages, des animaux irréels, des gravures du temps, des photos d’aujourd’hui, des desslns genre Pop’art un petit peu désuets… Elles étaient montrées en gros plan ou se partageaient l’ecran avec Jean-Michel Jarre, et on ne se rendait pas compte de l’effet produit sur place. Mais trois gendarmes mobiles, interviewés sur Europe 1 – Qui diffusalt également la fête en direct, – ont declaré émus, qu’il "fallait le voir pour le croire". Et la soirée s’est terminée par un feu d’artifice sur les fontaines éclairées, fantastique, féerique, une grandloss splendeur. On n’a encore rien inventé de plus beau que ces joyaux d’un instant.

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01 août 2013

3 questions sur… La Concorde (1979)

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1) Tu as pas mal cogité avant de faire ton premier concert en extérieur?
J-M J : "Il s'est posé le problème de présenter une alternative à la performance pop sur scène, avec des instruments qui ne sont pas sexy. En expérimentant, je suis tombé sur des gens qui travaillaient le visuel. D'où cette idée de présenter ma musique de manière différente d'un concert de rock, avec l'adjonction de visuels et aussi l'idée que celle-ci avait besoin d'un autre genre de lieu que les salles de concert. En fait, avec le rock, tu prends le son dans le bide alors qu'avec la techno, il traverse le corps. C'est davantage une musique d'espace et donc, j'ai eu envie d'aller dehors pour y intégrer l'architecture et l'image. Toujours avec l'idée de pirater, car la musique électronique part de l'idée de samples, d'emprunts, de la notion de détournement. Il fallait pirater un lieu. Ca préfigure ce qui s'est passé avec les raves qui exprimaient une autre forme musicale en y adjoignant nombre de techniques visuelles, tout en piratant les lieux."

2) N'y a-t-il pas plus institutionnel que la Place de la Concorde assez difficile à pirater! Comment ça s'est passé?
J-M J : "Lorsque l'on est dehors, il est évident que soit on pirate un champ, soit dans une ville, on pirate un système. C'est faire en sorte d'avoir les autorisations pour faire quelque chose de ponctuel. Ce qui s'est passé, par hasard, pour la Place de la Concorde avec 1 million de spectateurs venus. Ce n'était absolument pas prévu. J'ai mis un an à m'en remettre, c'était tout à fait expérimental. Je ne pense pas que les gens sont venus uniquement me voir, ils ont senti qu'il y avait peut-être quelque chose, un pretexte pour se réunir. Finalement, sans comparaison avec les raves, ça m'a toujours frappé de voir cet aspect spontané où les gens viennent sans être invités, juste par le bouche à oreilles.

3) Que s'était-il passé à l'époque? Les disques comme Equinoxe et Oxygène ont-ils suscité la curiosité?
J-M J : "Oui, c'était lié à cela. Un phénomène qui dépasse le cadre de l'événement et du concert. Oxygène et Equinoxe sont devenus extrêmement populaires dans le monde entier et ont marqué ce moment. Les gens étaient curieux de voir comment on faisait une autre musique. Aujourd'hui, il y a deux manières pour les performances musicales : soit celle d'Orbital ou d'Underworld, ces DJs super-producteurs qui vont faire des concerts dans des clubs où on ne voit pas les gens. Et puis la scène façon Chemical Brothers et Prodigy qui renouent avec le rock au niveau de la performance scénique."


Propos recueillis par Jean-Yves Leloup

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