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20 février 2014

L'art jubilatoire de Jarre (Libre Belgique, 22/03/2007)

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Après bien des ennuis personnels et professionnels, il revient avec un album amoureux. Jean-Michel Jarre vous laisse vous raconter votre propre histoire de « Téo et Téa ». Et la rencontre se passe surtout sur les dance-floors.
Il le dit sans ambages : ce nouvel album a été réalisé "après une période assez sombre de ma vie personnelle, dont on a trop parlé, et des difficultés professionnelles en quittant une maison de disques." D’où l’aspect indéniablement "jubilatoire" du nouvel opus de Jean-Michel Jarre, qui fricote avec l’électro façon french touch. A bientôt soixante ans, le fringant Lyonnais, qui aime parfois jouer sur la symbolique lourdingue de certains lieux, se replie donc sur les dance-floors, une mutation opérée depuis l’excellent «Métamorphoses» paru en 2000. Le présent album s’appelle tout simplement «Téo & Téa», écrits en lettres au néon. Il y est essentiellement question d’amour, sous toutes ses formes.

:: « Téo & Téa », c’est comme un titre de film. ::
D’une certaine manière. Je suis parti de l’idée que, dans la société actuelle, une des priorités est la recherche de l’autre, d’un partenaire. C’est devenu quasi obsessionnel, on voit ça avec l’éclatement des sites de rencontres. Dans cette société, en apparence, on a de plus en plus d’outils de communication, mais les gens sont de plus en plus seuls. On a de plus en plus besoin et envie de chercher un partenaire avec qui, au-delà du partage des expériences sexuelles, vivre des valeurs et des émotions communes. L’histoire de Téo et Téa est un peu ça. J’ai choisi de la décrire musicalement, en relatant la rencontre dans tous ses états. Et qui dit rencontre dit évidemment, au départ, un moment dynamique. D’ailleurs, on utilise des métaphores du domaine de l’électricité comme le coup de foudre, se brancher, etc. Automatiquement, je suis allé vers des rythmes plus dynamiques, plus dance-floor, plus rythmiques et plus jubilatoires.

:: Est-ce un album concept ? ::
Je me méfie de l’idée. Tous mes albums ont toujours reposé sur une idée fondatrice ou directrice. N’écrivant pas de chanson à proprement parler, même s’il y a des mots ici, j’ai toujours eu le besoin, l’instinct de partir avec un fil conducteur. En partant du principe que la musique est un des derniers modes d’expression qui laisse l’audience libre de créer son propre film, sa propre histoire. «Téo et Téa» n’est pas une histoire que je raconte, mais une histoire qu’on peut se raconter à partir des éléments que je donne dans le disque.

:: Fréquemment en électro, la musique renvoie à des images filmiques. ::
Il y a une raison à cela. Depuis les années soixante, on a l’impression que la musique se résume à la chanson. Il faudrait se poser la question de savoir si la chanson n’est pas un simple secteur de la musique, plutôt que l’inverse. Ce que vous dites est alors vrai de toute forme de musique. L’art de Wagner ou du Mahler est très visuel. Une des grandes caractéristiques de la musique est de faire naître des images, et, dans un monde extrêmement lié à l’image, c’est un des seuls modes d’expression qui permet de ne pas donner de visuel «prémâché», mais de laisser l’auditeur créer ses propres images. De ce point de vue, la musique est certainement l’outil le plus interactif qui soit.

:: Avez-vous déjà des idées de mise en scène pour « Téo & Téa » ? ::
Pas du tout. L’univers de la pochette peut rappeler une ambiance à la David Lynch, et pour la composition de l’album, j’ai été influencé par le film « Sailor et Lula ». J’aime énormément l’univers de Lynch, un des seuls cinéastes à ne pas raconter d’histoire toute faite. Au cinéma, les gens sont habitués à être passifs. Quand il faut être actif, comme devant une peinture, une installation vidéo ou une musique, les gens sont vite déconcertés. Le côté visuel de Lynch m’a beaucoup inspiré, mais pas nécessairement pour ce que je ferai sur scène. Cela, c’est en train de mûrir, dans cette imagerie-là. Je vais m’y pencher dans les jours qui viennent.

:: Avec un titre comme «Vintage», on pouvait s’attendre à la présence d’instruments électro-acoustiques anciens comme les Ondes Martenot. En êtes-vous féru ? ::
Absolument. Sur scène, j’utilise depuis un certain temps le thérémine, un des premiers sinon le premier instrument d’interprétation des fréquences électroniques (inventé en 1919, NdlR). Mais j’ai un rapport étrange avec cet instrument parce que je n’en joue que sur scène, jamais en studio, et je ne répète jamais. Finalement, je suis devenu pas trop mauvais, parce que le thérémine est un instrument très difficile à domestiquer. Je suis obligé de jouer les yeux fermés, à l’aveugle, parce que dès que je regarde mes mains, je suis perdu. C’est un instrument extraordinaire, extrêmement sensuel, physique. Mon père (Maurice Jarre, NdlR) s’est beaucoup servi des Ondes Martenot, moi moins, mais par contre j’aime beaucoup les Moog et le ruban sensifif qu’avait aussi inventé Robert Moog.

:: Vous sentez-vous redevable de quelqu’un comme Pierre Henry ? ::
Pierre Henry pas trop, Pierre Schaeffer beaucoup plus. Je dois tout à Pierre Schaeffer, je pense d’ailleurs que nous lui devons tous tout. Il n’a absolument pas la place qu’il mérite. Quand il est arrivé, la musique n’a plus jamais été pareille. Il a défini toute la musique moderne en partant du principe qu’elle n’est pas faite uniquement de notes ou d’accords ou d’harmonies, mais aussi de sons, et que ce qui différencie le bruit d’un son est la main du musicien. Ces deux petites phrases-là ont changé l’univers musical dans le monde. Aujourd’hui, tous les DJ’s sont des enfants ou des petits enfants de Schaeffer.

Album « Téo & Téa », Warner Music, sortie le 23 mars.

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17 février 2014

Jean-Michel Jarre. L’album de sa vie. (Paris-Match, 22/03/2007)

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coupure presse,téo et téa,2007A 58 ans, il semble avoir retrouvé énergie et inspiration. Avec son quatorzième album studio, «Téo & Téa», très autobiographique, il entend rappeler qui est le maître de la musique électronique.

Ce n’est pas le genre de disque très attendu. Et c’est bien là son charme. « Téo & Téa », premier véritable nouvel album de Jean-Michel Jarre depuis «Métamorphoses» paru en 2000, surprend. Comme si, agacé d’être honteusement copié depuis l’arrivée de la « french touch », Jarre avait essayé de montrer qui est le patron. Il y a ce son d’abord, puissant, lourd et efficace, ces morceaux aussi, treize au total, mais tous assez courts, très énergiques le plus souvent, mélancoliques parfois. Aucun texte, seulement des émotions que le compositeur met en musique. Réussi ? Oui, franchement.

«Ces cinq dernières années ont été assez bouleversantes, raconte l’intéressé. Ma vie professionnelle et ma vie personnelle ont connu de nombreux soubresauts.» Tout le monde se souvient de sa brève romance avec Isabelle Adjani, de leur séparation médiatique par presse interposée. Puis Jean-Michel a épousé la comédienne Anne Parillaud, et n’a pas hésité à afficher son nouveau bonheur. Histoire de mettre un terme aux rumeurs. «Je me suis retrouvé, je suis resté debout, dit-il. Ma vie a souvent traversé des montagnes russes. Je me sens parfois dépressif, c’est l’absurdité des hauts et des bas. Ça vous tombe sur la gueule un jour ou l’autre… Cela vous plonge dans un état de vertige, un état d’égarement.» Puis vous sortez la tête de l’eau. Le jour de son mariage avec Anne, Maurice, son père, est présent. Jean-Michel, peu enclin aux grandes déclarations d’amour, peut, enfin, tourner la page d’une interminable brouille. «Je sais ce que je dois à Anne dans cette réconciliation. Aujourd’hui, j’ai des relations avec mon père, ce qui n’a pas été le cas pendant des années. La boucle est bouclée.»


Apaisé, le cœur moins lourd, l’esprit plus léger, Jarre s’empare de ses claviers et se lance dans la composition. Une centaine de titres arrivent très vite. Le projet « Téo & Téa » se dessine. «Je voulais évoquer le retour à l’autre, la recherche de son double. A tous les âges, on passe notre temps à vouloir partager nos émotions avec quelqu’un, peu importe le sexe ! » « Téo & Téa » va droit au but. On sent le coup de foudre, l’envie d’être éternellement jeune, le désir de vivre à fond, comme des gamins. Il y a un peu d’Anne dans Téa (on l’entend très distinctement pousser des cris sur « Beautiful Agony ») et beaucoup de Jean-Michel dans Téo. «La société dans laquelle on vit imprègne forcèment nos créations. J’ai le sentiment que, dans les années 80 et 90, nous étions dans une époque cynique. Aujourd’hui, nous sommes prêts à tout dans notre quête absolue de l’autre. Téo et Téa sont dans l’insouciance de l’amour, dans l’envie d’avancer ensemble. Ils ne sont pas nécessairement jeunes, ils ont chacun évolué dans des mondes parallèles avant de se trouver. Et l’étincelle de leur rencontre leur donne une nouvelle énergie.»

« Téo & Téa » fait effectivement preuve d’une inspiration retrouvée… «Même si j’aime beaucoup «Aero» (son album paru en 2004), j’étais à l’époque trop occupé par les histoires de « son 5.1″ et de « son surround » pour arriver à composer moi-même. J’étais enfermé dans la technologie, enfermé dans la quête de sons inouïs. J’étais frustré par la mauvaise qualité du C.d., la crise du disque vient de là également. Le C.d., pour moi, c’est le 78-tours du numérique !» avoue-t-il aujourd’hui. Depuis, Air, Daft Punk, les Chemical Brothers, Bob Sinclar, Emilie Simon et bien d’autres ont imposé leur talent sur la scène électronique mondiale. «Je n’ai pas de revendications musicales, car j’ai toujours eu du recul. Je fais de la musique électronique depuis toujours. J’ai vu des vagues passer et emporter plein de gens avec elles. Qui parle encore de la « french touch » ? Depuis 1976, j’aurais pu me contenter d’être le truc branché du moment, mais j’ai toujours su m’en préserver. En ne cherchant pas à comprendre, car un artiste n’a pas à se poser cette question.»

En concert le 15 avril au Queen à Paris.

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15 février 2014

"Je m’inspire des modes, mais je n’y entre pas" (24 heures, 13/04/2007)

Une tête d’ado ébouriffé et un savoir-vivre de gentleman, Jean Michel Jarre est paradoxal comme sa musique, à la fois hyperpopulaire et hyper- sophistiquée. Interview à l’occasion de la sortie de Téo et Téa, dernier album très réussi. Blouson de cuir blanc et brun et jeans gris, Jean Michel Jarre a l’élégance branchée. A cinquante-neuf ans, son visage est celui d’un enfant coiffé d’une tignasse indisciplinée. Il soupire, prêt à subir le énième entretien de sa promo. Mais sa réserve fond à l’écoute de son tube planétaire Oxygène, enregistré sur un petit dictaphone de journaliste pas techno du tout. Sourire aux lèvres, le pionnier de l’électro s’ouvre à la vie.

Que ressentez-vous encore à l’écoute d’Oxygène ?
– C’est comme si je l’avais composée hier, car j’ai un rapport au temps particulier. Cette musique m’a accompagné dans le monde entier. Parfois, elle m’a même précédé. Comme en Nouvelle-Zélande où je n’étais jamais allé et où j’ai découvert que c’était le générique du journal TV. C’est donc une musique qui me fait voyager dans le temps et dans l’espace.
Téo et Téa est un excellent nouvel album, plus tourné vers l’humain…
– Le thème de l’album est lié à la rencontre, aux sensations et aux sentiments de l’humain. Je l’ai fait avec une certaine jubilation. J’ai travaillé avec des instruments non virtuels comme des synthétiseurs. Cela m’a permis d’avoir un rapport plus organique et plus sensuel avec le son.
Est-ce aussi une rencontre avec vous-même?
– Oui. Je me suis beaucoup rapproché de mon père ces dernières années. Son absence était une béance qui m’a marqué. Le revoir m’a réidentifié et aidé à mieux me repérer. J’ai finalement pu dire des choses que je ne pouvais pas exprimer avant, par incapacité psychologique.
Concernant la musique, voyez-vous une filiation avec celle de votre père?
– Non. J’ai grandi loin de son sillage. Mes musiques de films sont plus influencées par Ennio Morricone ou Nino Rota. Mais Maurice Jarre a fondamentalement changé le rapport de la musique et de l’image. Il a été l’un des premiers à marquer au fer rouge l’ambiance d’un film avec un thème musical. On écoute trois notes du Dr Jivago et l’on revoit les images
Vous possédez aussi cette cohérence musicale?
– Je ne suis pas tourné vers le passé, mais lorsque je compose, c’est comme si j’ouvrais une porte et que je rentrais chez moi. Je n’ai jamais été à la mode. Je m’inspire des modes, mais je n’y entre pas. Quand il y a eu l’explosion de l’électro, cela ne m’a pas empêché de continuer à dire les choses à ma manière. Téo et Téa est un album fidèle à mon univers et en phase avec ce que j’ai envie d’écouter en 2007.
D’où vous vient ce besoin de concerts à l’extérieur?
– Je vais vous dire une chose à laquelle je viens de penser: c’est ma claustrophobie. Je me demande si ce n’est pas une des raisons pour lesquelles j’ai voulu faire des concerts à l’extérieur. Ma mère a été déportée en Allemagne. Elle a subi un bombardement dans un wagon. Autour d’elle, beaucoup de gens sont morts d’étouffement. Elle a survécu, mais elle a été claustrophobe longtemps et m’a transmis ce traumatisme. Une autre raison, c’est qu’il fallait mettre en scène les instruments électroniques et inventer une grammaire scénographique qui permet de «voir» la musique.
Quels territoires vous restent-ils à explorer?
– Plus vous creusez votre chemin, plus les territoires s’ouvrent à vous et dessinent des chemins innombrables. C’est une histoire sans fin. Il y a donc de plus en plus de choses que j’ai envie de faire, notamment des musiques de film. J’ai peu abordé ce genre car je crois que, psychanalytiquement, c’était le territoire du père.
Quels sont les cinéastes avec lesquels vous aimeriez travailler?
– Plein. Je viens de terminer la musique d’un film de Volker Schlöndorff, le réalisateur du Tambour. Il y a aussi David Lynch dont le film Sailor et Lula m’a suivi pendant la gestation de ce dernier album. Et puis, il y a des cinéastes comme Steven Soderbergh, pas tellement pour Ocean’s eleven, mais pour les films qu’il a pu faire avant, très oniriques. Le réalisme et l’expressionnisme ne m’intéressent pas, quel que soit le domaine. J’ai besoin qu’on m’emmène dans des endroits fantastiques.
Est-ce pour cela que vos compagnes sont toutes comédiennes?
– Oui. J’ai besoin d’être emmené au quotidien dans un rêve. Cela ne veut pas dire que je n’ai pas le sens des réalités. J’aborde simplement la réalité avec un angle et un point de vue. J’ai vu un jour, en Indonésie, un enfant nu dans une rivière qui riait. Il n’avait rien. Ni parents, ni vêtements, ni nourriture; son espérance de vie était moindre et il éclatait de rire en voyant le soleil se lever. Pour moi, ça a été une expérience de vie incroyable.
Finalement, votre choix de l’électro était-il courageux?
– Non, car j’étais totalement fasciné par Pierre Schaeffer. Sa manière de faire de la musique, un peu comme on fait la cuisine, en triturant des notes et en mélangeant les fréquences était une approche très concrète et sensuelle du son qui m’a séduite.

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14 février 2014

Jarre retrouve son «Oxygène» (Le Figaro, 10/12/2007)

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Trente et un ans après la sortie de son mythique premier album, le musicien l’a réenregistré et donne une exceptionnelle série de concerts intimes à Paris.
"J’ai enregistré Oxygène dans l’ancienne cuisine de mon appartement. À l’époque, les albums sérieux se faisaient dans des gros studios, pas chez soi. Je m’étais toujours dit qu’un jour je réenregistrerais Oxygène de manière sérieuse », raconte Jean-Michel Jarre. Et voici qu’il l’a fait : pour célébrer les trente ans du disque qui l’a rendu célèbre dans le monde entier, Jean-Michel Jarre ressort Oxygène dans un nouvel enregistrement, plus exigeant."

"Issu de chez Schaeffer, j’avais l’habitude de mixer moi-même non les chansons et la pop music, mais la musique que j’avais réellement envie de faire, une musique électronique qui soit un pont entre la musique expérimentale et la pop music. Il fallait que je contrôle les choses du début à la fin. C’est devenu aujourd’hui une manière classique de faire de la musique mais, à l’époque, on ne mixait pas en même temps qu’on enregistrait. J’avais un matériel minimal et j’ai enregistré sur un vieux magnétophone huit pistes", se souvient le compositeur. Le nouvel Oxygène a été enregistré en CD et en DVD en une seule prise et en direct, Jean-Michel Jarre et trois acolytes rejouant dans des conditions de concert les huit pistes originales. Mais les instruments n’ont pas changé : une sorte de préhistoire de l’électronique d’aujourd’hui, avec les synthétiseurs Moog modulaires, les ARP 2500, les Mellotron, les Theremin qu’il avait conservés depuis 1976. « Ces instruments font partie de la mythologie de la musique électronique. On peut les comparer aux Stradivarius pour la musique classique, à la guitare Paul Gibson pour le rock, mais leur culte ne s’est jamais vraiment développé parce qu’ils ont cessé d’être fabriqués au début des années 1980. »

:: Une popularité planétaire ::
Avec Oxygène, vendu à douze millions d’exemplaires, Jarre avait basculé dans une popularité planétaire, ses disques étant diffusés sur toutes les antennes et ses concerts géants rassemblant toujours plus de spectateurs. On en oublia son double cursus d’origine : le monde des variétés et les chansons écrites pour Christophe, Françoise Hardy, Patrick Juvet ou Gérard Lenorman, et la pointe de l’avant-garde contemporaine au mythique GRM (Groupe de recherche musicale) de Pierre Schaeffer, inventeur de la musique concrète. «À travers ce projet, je veux rendre hommage à Pierre Schaeffer, qui a été mon maître absolu. Il n’a pas sa place aujourd’hui dans le monde de la musique et c’est honteux : toute la musique électronique mondiale vient de lui et de personne d’autre. Il a écrit le Traité des objets musicaux, livre qu’il faudrait mettre à l’école plutôt que la méthode rose et le pipeau en plastique. Il a été le premier à dire que la musique n’est pas seulement faite de notes mais de sons, et que la différence entre un bruit et un son, c’est le geste du musicien.»

Cela n’a pas empêché que la musique électronique n’ait pas toujours eu une excellente réputation : «La musique électronique, et les synthétiseurs en particulier, ont charrié énormément de contradictions et d’ambiguïtés. Le premier album qui a popularisé le synthétiseur c’est Switched-on Bach, de Walter Carlos, qui a surtout marché dans les pays anglo-saxons et qui accrédite l’idée que le synthétiseur est un faux instrument qui sert à imiter des instruments acoustiques. Or, c’est précisément un instrument fait pour inventer ce qui n’existe pas : le son de la lune ou le son que vous avez dans la tête. Ensuite, j’ai beaucoup souffert après l’arrivée du DX7 : on a collé alors au synthétiseur l’idée qu’en pressant un bouton on avait un violon , des cuivres et allez, pouet pouet !» Le pire est qu’en 1983, quand Yamaha sort le DX7, premier synthétiseur numérique qui couvre tous les besoins, de l’initiation au travail de scène professionnel, on trouve des presets qui permettent de jouer avec le son de Jean-Michel Jarre.

Le compositeur a voulu restituer le son d’origine avec une série de dix concerts à partir de mercredi au Théâtre Marigny, un lieu intime pour cet habitué des grands shows en extérieur. En janvier, le CD de son nouvel Oxygène sera encarté dans le Mail on Sunday, après de spectaculaires opérations comparables de Prince et de Coldplay. Un total de 2,7 millions d’exemplaires. Le retour aux grands nombres.

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10 février 2014

Jean Michel Jarre le «sale gosse» génial (Tribune de Genève, 14/04/2007)

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Rencontre autour de «Téo et Téa», un CD qui, justement, traite de rencontres. Il a des mains d’enfant. «De sale gosse», comme il le dit lui-même. A près de 59 printemps, Jean Michel Jarre semble avoir englouti deux bons gros barils d’élixir de jeunesse.

Ces mains-là n’ont pas beaucoup changé depuis qu’elles fouillaient, fébriles, dans le bric-à-brac d’un grand-père à la Géo Trouvetou. «Je pense à lui à chaque album, raconte le musicien. J’allais dans son atelier et il y avait un tas de trucs bizarres. J’adorais bidouiller avec ça, toucher ces objets, dans un rapport quasi sensuel. »

Soixante millions d’albums vendus plus tard, Jean Michel Jarre continue de triturer les sons avec la même gourmandise. Téo et Téa, son nouveau CD, est l’aboutissement de ces manipulations fructueuses. Un disque plein d’allégresse, bien décidé à vous filer un coup de pied au cul pour vous expédier illico sur les pistes de danse. «C’est mon album le plus rythmique à ce jour, avec ce côté dance floor», confirme le pape de l’electro.

:: La quête de l’autre ::
Dans l’excellent clip tiré de l’album, on voit deux ados courir comme des dératés sur fond de mégalopole désertée. Aurait-on tout ôté à Téo et Téa? «C’est un disque qui traite du thème de la rencontre, précise le musicien. Il y a de plus en plus d’outils de communication et on se parle de moins en moins. Il suffit de jeter un oeil sur Internet: on assiste à une explosion des sites de contacts, et pas seulement pour des rencontres sexuelles. Ça va au-delà: c’est devenu une véritable quête».

:: Métaphore de l’électricité ::
Hasard ou pas, le petit personnage du film 3D n’est pas sans faire penser à Jean Michel Jarre, avec son épaisse tignasse brune. D’ailleurs, la jeune fille qui sprinte à ses côtés pourrait tout aussi bien être sa compagne, la comédienne Anne Parillaud. «Téo et Téa, ce n’est pas une histoire de couple, corrige l’intéressé. C’est plutôt une rencontre dans tous ses états. Et c’est une métaphore sur l’électricité, avec le coup de foudre, la tension, le fait d’être branché sur quelqu’un. »

On pourrait pousser la métaphore plus loin encore. Et affirmer qu’avec ses mégashows, Jean Michel Jarre s’est toujours fixé pour objectif d’établir le courant avec la multitude.

«Les instruments acoustiques ou du rock sont nés du jeu de la performance, au contact de la scène, explique l’artiste. Les instruments électroniques nécessitent une scénographie. Dans la mienne, il y a toujours un contenu visuel très fort. Les images valent mieux qu’un long débat: il faut passer par le coeur et l’émotion.»

Ambassadeur de l’Unesco, investi dans la lutte contre l’illettrisme et pour la sauvegarde de l’eau, Jean Michel Jarre applique la méthode jusque dans ses engagements. «Les discours politiques par rapport à l’environnement, je trouve que ça n’a pas une réelle importance, relève-t-il. Ce qui compte, c’est la prise de conscience des gens. Je crois que, de toute manière, ils seront amenés à réagir, ne serait-ce que par égoïsme.»

On le voit, la star internationale n’a pas dévoré le citoyen. Difficile, en outre, de faire plus disponible que Jean Michel Jarre. Au-delà des grandes causes et au sortir des scènes immenses, l’artiste s’immerge volontiers dans les contrées traversées pour en saisir l’âme. «Les concerts, finalement, c’est aussi un prétexte pour pouvoir pénétrer les pays, conclut-il. Et aller au contact des gens. » Sans atteindre à cette intimité, c’est par le biais des clubs que le musicien viendra bientôt rendre visite à la Suisse. Même si, pour l’heure, Téo et Téa n’ont toujours pas déterminé s’ils s’enlaceront sur les pistes lausannoises ou genevoises.

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