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23 février 2014

Le petit prince à la harpe laser (Télé magazine, 01/06/1987)

coupure presse,1987,lyonUne journée entière avec lui ! Le 11 juin, A2 vivra en direct avec Jean-Michel Jarre, du petit déjeuner en familIe jusqu’au dernier journal. En apothéose, à 22 heures, le film d’un concert-spectacle historique… Souvenez-vous : c’etait à Lyon, le 5 octobre dernier, pour la visite du pape Jean-Paul ll. Chants d’allégresse, danses et musiques, assistance galvanisée : la fête bat son plein sur le parvis de la cathédrale. Nous sommes au pied de Notre Dame en un beau jour d’Epiphanie… au XIIIème siecle. Débauche de couleurs, feux de joie, envol des trompettes, haut-bois et saqueboutes. L’hôtel de ville de Paris reçoit, vêtu de blanc, le jeune François Ier. Embrasement du grand canal, plaisirs royaux d’iles enchantees. Lully met en musique les fastes du Roi-Soleil dans la gloire baroque du XVIIe siècle. Feux d’artifice en niagaras, choeurs d’enfants, harpe laser et synthétiseurs chauffés à blanc. Nous voici à Lyon le 5 octobre 1986. Rien de change sous les étoiles. Tradition. Tradition. Jean-Michel Jarre est l’héritier des magiciens de toutes les fêtes. Qu'importe si le synthétiseur remplace le flageolet… «Rien n’est plus stable dans le coeur humain que les sources de l’émotion.» Il sourit. Il a quelque chose du Petit Prince qui aurait échangé sa rose aimée pour un rayon laser, quelque chose d’un apprenti sorcier qui serait passé maitre en sortilèges éphémères. «Ephémères ? oui. C’est ce qui m’intéresse. Un événement non reproductible. Un lieu vierge. Un instant où tout se joue sans répétition.»

:: Un hymne à la création ::
Fête-baroque. Opéra-ballet dont les danseurs sont des rayons lumineux. Il n’en reste même pas une partition comme pour «Water Music», de Haendel, ou «Les lndes galantes» de Rameau. «C’est pourquoi pour Lyon comme pour Houston, j’ai conçu un film parallèlement au spectacle. Non comme un reportage, mais comme une re-création. On passe de l’immersion totale aux dimensions du petit écran. . . Comme on transcrirait une symphonie pour un piano.» Harmonie pas de contradictions entre les instruments anciens et ceux de notre temps : entre la flûte des premiers bergers et le clavier son et lumière du XXe siècle. Le Voleur volé « Les sons, dit Jean-Michel Jarre, fascinent partout dans le monde : dans la nature et dans les villes : du tambour chinois au bruit de la pluie. Je les vole, je les recrée. 0n me les vole aussi en Chine ou en Amérique. Je suis un pilleur pillé. Et j’aime cela » .

Du coup, le téléspectateur verra, entendra, sentira mieux chaque mouvement de ladite symphonie : hymne à la création où se déroule l’histoire du monde en symboles circulaires, du globe à l’escargot, de la pupille à l’engrenage… puis chant de liberté où flamboient les drapeaux des nations… acte de foi ponctué de la bénédiction,pontificale… gloire à l’humanité quand s’élèvent des choeurs d’enfants… bouleversant requiem solitaire d’un saxophone…final d’allégresse où éclate la musique populaire. A la clé, le mariage des antiques tambours japonais et de la harpe-laser, d’un orchestre classique et de projections géantes, de chorales et de vidéos. Vertige d’hyper-technicité? «Non. Goût du bric-à-brac.» Et surtout cette conviction: « A notre époque, on peut avoir un ordinateur chez soi et prendre un vélo pour aller chercher ses croissants. En musique, c’est la même chose, L’électronique ne vous donne pas des semelles de plomb mais des bottes de sept lieues. Vous avez tout de suite le son dont vous rêvez. Sans relais. Sans interprètes. Imaginez que l’on puisse entendre aujourd’hui les oeuvres de Mozart, Beethoven, Mahler, Richard Strauss telles qu’elles sonnaient dans leur tête ! » Regard émerveillé. On oublie – le coup du charme ! – les années de travail, les deux cent cinquante personnes du "commando Jarre", les trente millions de disques vendus, les » coups fumants » de la Concorde, de la Chine, de Houston. Et point n’est besoin de gratter une carapace pour retrouver quels éblouissements d’enfance furent sources de ces savants et naïfs « Opéras du troisième millénaire » (le mot est d’un fin mélomane : Raymond Barre) : «A Lyon, sur l’esplanade, près de la gare, les forains dressaient leurs chapiteaux. J’étais fasciné par cette débauche de couleurs et de sons, d’odeurs et d’images, de lumières, de rires et de sauts perilleux.» Cela c’est pour le gout du spectacle. « Quant à celui de la technique, de l’invention et de la maîtrise du son, il me vient de mon grand-père : il jouait du hautbois et il était également ingénieur, inventeur. » Et voilà pourquoi les rayons : d’une harpe laser, jouée par un chef d’orchestre dansant, se sont élèves dans la nuit pour célébrer la visite d’un pape ? « Hum ! c’est aussi et surtout parce que Jean-Paul II est le symbole vivant d’une communication possible entre les peuples. Celle-là même que je sens, moi, à travers la musique. Hier en Chine; demain à Londres peut-être; un jour, je l’ éspère, à Ayers Rock, ce rocher rouge au coeur du désert australien. Le synthétiseur, la télévision, les satellites, cela ne vous coupe pas des gens au contraire.
Dans chaque spectacle je sens battre le coeur des foules. C’est fantastique. Même à Houston ou les spectateurs se trouvaient à huit kilomètres de la scène, même à Lyon où ils étaient de l’autre côté de la Saone, le courant est passé, n’est-ce pas ? Voyez-vous, je crois profondément qu ‘ on peut détourner la technologie pour en faire quelque chose d’humain. » .

00:00 Publié dans Interviews / Presse | | Tags : coupure presse, 1987, lyon |  Facebook | | |