23 janvier 2014
Le gros, le maigre et le chevelu (France Soir, 01/01/1971)
Norbert Scmucki (le maigre), JMJ (le chevelu), Igor Wakevitch (le gros). Ils étaient contents, les spectateurs de l’Opéra, de retrouver leurs étoiles et de se défouler par huées et acclamations. Quelle soirée bruyante des deux côtés de la rampe ! L’entrée en scène des auteurs du nouveau ballet «aor», le trio des copains Igor Wakevitch, Jean Michel Jarre et Norbert Schmucki (soixante-deux ans à eux trois) a soulevé l’hilarité d’une partie de la salle. Il faut dire que physiquement, c’est un choc. Il y a un gros, un maigre et le sosie chevelu d’Antoine le chanteur.
Igor, le gros (fils du décorateur), c’est le compositeur sérieux : sa musique est tout ce qu’il y a de symphonique et il utilise l’orchestre avec ampleur.
L’avantage de sa partition est qu’étant inconnu on ne peut juger des erreurs, tandis que dans « Etudes » ou « Boléro » ouvrant et fermant le spectacle, quel manque d’enthousiasme dans la fosse ! Peut-être les musiciens étaient-ils vexés d’avoir été supplantés dans une grande partie du ballet « Aor » par la musique électronique de Jean Michel Jarre (fils de Maurice).
Son salut fut diversement accueilli par ceux que l’électronique et ses pétarades agacent. Personnellement cela m’amuse plutôt. Enfin ce fut l’entrée de Norbert Schmucki la plus attendue, la plus huée et la plus applaudie puisqu’il signe à la fois l’argument, la chorégraphie, le décor et les costumes.
« Aor » est une version de Salomé. Si on ne lit pas le programme, il est possible de ne pas s’en apercevoir. A première vue c’est une dame bien faite, folle de son corps (Claude Bessy) qui a envie d’une boule de verre (Norbert Schmucki est très attiré par l’occultisme). Cette boule de verre est le symbole de la tête de saint Jean-Baptiste, il n’ya pas non plus de danse des sept voiles, mais des sept tentations concrétisées par les couleurs de l’arc-en-ciel, l’indigo étant la pureté, le rouge la sensualité, etc. Ce qui permet aux étoiles de se différencier. Christine Vlamy, mante religieuse jaune est merveilleuse et Brigitte Lefèvre, comme toujours apporte son étonnante présence.
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22 janvier 2014
Schmucki : un lion ou un aigle ? (Aviae arca, 01/01/1972)
Schmucki a pu faire son entrée, par la grande porte, cette fois, à l’Opéra de Paris où pour la reprise des soirées de ballet, il a donné une création : « Aor » sur une musique originale de deux jeunes compositeurs, Igor Wakhevitch est Jean-Michel Jarre. Cette oeuvre puissante, d’un style tout à fait nouveau, a fait sensation sous les dorures du Palais Garnier.
Certes, il fut contesté par les habitués traditionnalistes de l’Académie Nationale de Musique, ce qui n’étonnera personne puisque traditionnellement ce public conteste toutes les créations quelles qu’elles soient. Rappelons-nous l’accueil tumultueux fait à « Notre-Dame de Paris » de Roland Petit, maintenant considéré comme l’un des meilleurs spectacles du répertoire… et celui qui fut réservé aux ballets de Michel Descombey qui font maintenant un triomphe international.
Malgré les efforts désespérés d’une cabale organisée en l’honneur de « Aor », le vrai public a réagi avec enthousiasme devant la beauté du spectacle qui lui était proposé par Schmucki, et on peut dire, sans risque de se tromper, qu’Aor comptera comme une pièce maîtresse du répertoire.
Ce ballet a été conçu à partir de la danse des sept voiles de Salomé, mais s’est échappé complètement des versions réalisées jusqu’à ce jour : chaque voile est devenu un tableau d’une couleur différente symbolisant les différents visages de la séduction féminine. La musique d’Igor Wakhevitch, instrumentale, et celle de Jean-Michel Jarre, électronique, constituaient elles aussi des innovations dans ce grand théâtre à l’italienne.
Norbert Schmucki, comme d’habitude, avait veillé très attentivement aux choix de ses interprètes parmi lesquels on peut mentionner : Claude Bessis, Jean Guizerix, Wilfride Piollet, Cyril Atanasoff, Christiane Vlassi, Patrice Bart, Francesca Zumbo, Jean-Pierre Franchetti, Nicole Chouret, Brigitte Lefevre, Richard Duquesnoy, Nanon Thibon, etc…
Quant au décor audacieux et féérique traité dans l’esprit d’une aurore boréale et réalisé avec sept kilomètres de corde de nylon, il est aussi l’oeuvre de Schmucki ainsi d’ailleurs que les maquettes de costumes.
Nous avions écrit notre confiance dans le jeune chorégraphe qu’était Norbert Schmucki ; jusq’ici, nous n’avons pas lieu d’être déçus. Gageons que l’ascension de cet « aigle » ne fait que commencer.
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