17 janvier 2014
Jarre prêt pour les Minguettes (France Soir, 01/05/1989)
Il veut accompagner d’un concert l’implosion du quartier de Vénissieux.
Octobre 1988. Jean Michel Jarre rend un hommage à la Révolution avec un grand R. A sa façon : décors gigantesques dans les docks abandonnés de Londres, scène posée sur la Tamise justement agitée ce soir-là. Bouquets de lumière balayant le ciel furieux. Une danseuse japonaise évolue dans la tempête. Une chanteuse arabe vocalise sous la pluie. Hank Marvin, le guitariste des Shadows, se livre à un duo héroïque. La chorale des enfants de New Ham (lieu du concert) chante emmaillotée dans des gilets de sauvetage. Jean Michel Jarre articule (Ré-vo-lu-tion) et deux cent mille spectateurs oublient qu’il fait froid sur les rives de la Tamise ce soir-là.
« Ces deux concerts ont pris très vite des mesures apocalyptiques. Finalement comme si les dieux étaient avec nous, le miracle a opéré » dit aujourd’hui Jean Michel Jarre, ravi de se plonger dans les cartes postales visuelles du film que vous verrez ce soir sur Antenne 2 à 22 h 30, « Destination Docklands ». Un document qu’il présentera à 13 heures dans le journal de William Leymergie (A2).
« Je crois que c’est le film de mes concerts que je préfère. D’abord parce qu’il n’est pas un film de concert, un film tout court. » Fasciné par les images baignées d’une lumière particulière à cause de la pluie, Jean Michel Jarre a tenu à devenir assistant au montage. Dans la marche révolutionnaire, deux cents techniciens français, dix musiciens de rock, une partie du Philarmonic de Londres, Sari Bamba qui conduit les choeurs du Mali et chante solo sur « Dulcie September ». Dix-huit caméras vidéo se cachaient. Elles ont saisi les imprévisibles instants des deux événements éphémères.
Les concerts de Jarre sont devenus des voyages initiatiques dans l’espace et dans le temps. Après la Chine et les Etats-Unis, Jarre retourne sur le chemin de son école à Lyon, une première fois il y a deux ans. Le concert dans la ville des deux fleuves se déroule sous les yeux de Jean Paul II en visite. Le « bonsoir » du Pape tiendra d’ailleurs un rôle impromptu dans la bande du concert enregistré.
Les rythmiques du musicien n’accompagneront pas les défilés du 14 juillet cette année à Paris. « Je ne tiens pas à la symbolique du Bicentenaire, précise-t-il. Ce qui m’intéressait d’était de trouver un concept qui ne soit pas lié directement à 1989. »
Jean Michel Jarre planche désormais sur un nouveau projet aux Minguettes, ardemment soutenu par la ville de Lyon et son maire Michel Noir, le maire de Vénissieux, M. André Gérin, Charles Millon, président du conseil régional Rhône-Alpes, et Jack Lang, ministre de la Culture. Jarre a rencontré à ce sujet le ministre, hier, à Blois.
Septembre 1989, l’implosion des immeubles des Minguettes risque fort d’être accompagnée d’un grand concert… si le préfet de région revient sur son interdiction formulée vendredi. [Note du bloggueur : le concert n'aura jamais lieu] La reconstruction, pensée par un des quatre-vingt-dix architectes de renommée mondiale qui concourrent, sera visualisée d’une manière poétique. Le cardinal Decourtray, enthousiamé par cette idée, a estimé :
« Célébrer la transformation des Minguettes, c’est faire échec à l’échec. »
Dans ce site désolé, où les étages des dix tours inhabitées depuis six ans s’écroulent, un nouveau lieu architectural, plus humain et chaleureux, va s’animer :
« C’est la reconnaissance d’une nouvelle manière de pensée de la cité qui inclut une vision futuriste et sociale, dit Jean Michel Jarre. Nous allons fêter la mutation de la ville pour la reconstruire en lumière et en images.
L’implosion des immeubles en direct. L’événement musical et culturel intéresse déjà de nombreuses télévisions, des Etats-Unis à l’U.R.S.S. « Chacun a ses Minguettes dans le monde entier. »
Pour l’instant, Jarre prépare son « Champs-Elysées » de samedi. Un concert pour les cent de la tour Eiffel, en direct avec Drucker.
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