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15 janvier 2014

Jean-Michel Jarre, les voies humaines (Article du 1/11/1984)

Les exégètes avertis étaient prêts à ricaner : le nouveau disque de Jean-Michel Jarre, «Zoolook», ne pouvait être qu’une répetition. Un bis d’ «Oxygène» et d’ «Equinoxe», deux 33-tours qui avaient fait, pourtant, le bonheur , des teen-agers. Jarre était classé, catalogué : informaticien de la musique, technicien hyperdoué. Il multipliait, bien sûr, les tubes. II en vendait sous toutes les latitudes: vingt millions de disques, chiffre record pour un Français. N’empêche, réticences. Nombreuses et persistantes. Comment Supporter cette étiquette « musicien de supermarché » ? Raidissement, fureur rentrée : «( C’est exactement ce que je souhaite. ) Silence, iI ne parle plus, ne s’explique pas davantage. S’enferme avec sa femme, l’actrice Charlotte Rampling, dans une superbe maison de campagne. Jarre boudeur. Cette fois, iI s’est agi de faire taire les « autres », tous ces « autres » si français et si rétifs au succès commercial. Alors, Jarre s’est remis en cause. Son nouvel album ne fait plus la part belle aux synthétiseurs-ordinateurs.
« J’en avais assez de travailler sur ces sons devenus classiques. Apres « La guerre des étoiles », « Goldorak » et la pub, cette musique était devenue galvaudée, indigeste. » Il a donc choisi de travailler sur des « matériaux humains ». Des voix. Piquées au magnétophone, avec la complicité d’un ethnologue, Xavier Bellenger . Jarre s’est installé dans la défroque et la fonction d’un paparazzi à l’aguet des images sonores apparemment les moins audibles et intelligibles à l’oreille de l’Occidental moyen : pygmée, tibétain, sioux, malais ou esquimau. «( Ensuite, explique-t-il, j’ai procédé à la sélection, et j’ai tout fait ingurgiter par un ordinateur. J’ai transformé puis mixé comme s’il s’agissait d’un instrument normal. ) Jarre n’a pas su, ou n’a pas pu, résister à cette passion tenace d’une musique conceptualisée et hypertravailIée. La tentative est ambitieuse. Jarre accepte le risque de désarçonner ses fans. Peu lui importe. Le jeune homme – 36 ans déjà – croit en son étoile, en ses réussites. Quand « Zoolook » sera inscrit aux différents hit-parades, rien ni personne ne pourra l’empêcher de repartir en bataille. Contre qui ? « La chapelle, la sainte trilogie Xenakis-Boulez-Ircam. » Le paparazzi se veut également justicier.

00:00 Publié dans Interviews / Presse | | Tags : zoolook, 1984, coupure presse |  Facebook | | |