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02 août 2013

3 questions sur… Oxygène (1976)

oxygène,1976


1) Quelques années d'expérience dans les studios t'ont permis de découvrir des univers plus classiques pour nous. Le Jean-Michel Jarre que l'on connaît mieux, celui d'Oxygène et d'Equinoxe vient un peu après, vers la fin des années 70?
J-M J : "Oui, en 1976, pour Oxygène avec une forme de musique à laquelle je pensais depuis un moment. J'essayais de trouver une voie entre l'expérimental très mécanique, l'apologie de la machine à l' allemande et un côté plus latin, mélodique, avec une structure différente, pas plus planante, mais entre ciel et terre. Entre le planant du Floyd et un côté disco, les boites à rythmes assez fines que l'on a beaucoup utilisé ensuite avec la house. C'est le premier disque qui utilise des effets de phasing, des effets de guitares que j'applique sur le clavier."

2) Mais ne fallait-il pas être très riche à l'époque pour produire ce genre de musique?
J-M J : "Oxygène s'est fait dans la salle de bain de l'appartement où j'habitais. J'avais fait tout ça sur un 8 pistes et le mixage en un week-end. Le travail d'Oxygène a duré pratiquement un an. Il est proche de la manière dont Daft Punk a fait son premier album [Homework, NDLR] avec une petite console et peu de matériel. J'use un synthé, un orgue et un séquenceur bidouillé. Le matériel que j'avais alors n'avait rien à voir avec les grands Moogs allemands. Il y avait une différence à ce moment-là. Le Moog était intouchable en France, ça n'existait pratiquement pas, je sais même pas s'il y en avait un seul. C'était un instrument plus pour le mark que pour le franc (rires)."

3) Puis vient Jean-Michel Jarre, homme de spectacle, comment fait-on pour passer des studios fermés à une scène devant des milliers, voire des millions de personnes?
J-M J : "En fait, Oxygène est un disque refusé par pratiquement toutes les maisons de disques, qui disaient que ce truc ne pourrait pas marcher, trop instrumental, pas de chants, français, impossible. Puis, un indépendant français, Dreyfus, sort ce disque et ça devient le succés que l'on sait. Et là se pose vite le problème du concert. J'étais persuadé que la musique électronique n'était pas simplement une autre façon de composer, mais qu'elle deviendrait un courant à part entière, la seule alternative au rock. Nous, français ou continentaux, n'avions aucune chance avec le rock, que j'ai toujours considéré comme une musique ethnique anglaise ou américaine, mondiale soit, mais avec un terroir obligatoirement anglo-saxon. Quoi qu'on fasse on ne pouvait pas être égaux avec les Américains. En revanche, la musique électronique a toujours été une chose européenne, même si les développements ont eu lieu à Detroit par exemple. Le rock vient d'une société qui, au fond, n'a pas de passé artistique. Il y a peu de musique classique anglaise par rapport aux allemandes ou aux françaises. Nous avons ce background. Après la guerre arrive sans complexe une bouffée d'air pur sous forme de pop et de rock. Et on a du mal à s'en sortir. La musique électronique ne s'explique pas en trois minutes. C'est un autre forme de structure, plus cérébrale, qui convient mieux à notre continent. Ce n'est donc pas étonnant qu'elle démarre en France, en Allemagne et en Italie, plus qu'en Angleterre ou qu'aux Etats-Unis, même si des gens s'y intéressaient. Je pense que le concept de musiques électroniques démarre là."


Propos recueillis par Jean-Yves Leloup

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